La spécificité de l’entretien professionnel

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel maintient l’entretien professionnel, mais apporte des modifications au dispositif.

1. Comme l’a prévu la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale, le salarié bénéficie tous les deux ans d’un entretien professionnel avec son employeur consacré à ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en termes de qualification et d’emploi. Cet entretien ne porte pas sur l’évaluation du travail du salarié. Lors de son embauche, le salarié est informé ce cet entretien qui intervient dans les deux ans, à compter de la date d’entrée dans l’entreprise.

Complétant la loi du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels qui précisait que l’entretien comporte des informations relatives à la validation des acquis de l’expérience (VAE), la loi du 5 septembre 2018 stipule que ces informations sont également relatives à «  l’activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l’employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle ».

L’entretien professionnel donne lieu à la rédaction d’un document écrit dont une copie est remise au salarié.

Cependant, la loi du 5 septembre 2018  introduit une modification significative en indiquant qu’un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, de branche, peut prévoir une périodicité différente des entretiens professionnels de celle ainsi définie.

2. L’entretien professionnel doit être systématiquement proposé à tout salarié qui reprend son activité après une période d’interruption de travail : congé maternité, congé parental d’éducation, congé  de proche aidant, congé d’adoption, congé sabbatique, période de mobilité volontaire sécurisée, période d’activité à temps partiel, arrêt longue maladie, mandat syndical. Dans ce cas, l’entretien peut  avoir lieu, à l’initiative du salarié, à une date antérieure à la reprise du poste.

3. Cet entretien se situe ainsi dans une perspective de droit à l’évolution professionnelle et à la formation des salariés de l’entreprise, quel que soit son effectif ou la branche professionnelle dont elle relève. Il se distingue de l’entretien, souvent annuel, d’évaluation, qui  n’est pas rendu obligatoire par le code du travail et qui porte plus particulièrement sur les performances du salarié par référence aux objectifs qui lui ont été fixés.

(Références : loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel ; article L 6315-1 du code du travail).

L’état des lieux récapitulatif du parcours professionnel et l’abondement du compte personnel de formation (CPF) du salarié

Etat des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié

La loi du 5 septembre 2018 maintient que l’entretien professionnel doit tous les six ans faire « un état des lieux récapitulatif du parcours professionnel du salarié »  qui donne également lieu à la rédaction d’un document écrit dont une copie est remise au salarié. Cette durée s’apprécie par référence à l’ancienneté du salarié dans l’entreprise.

Cet état des lieux de ce parcours permet de vérifier que chaque salarié a bénéficié sur la période des entretiens professionnels et d’apprécier s’il a :

  • suivi au moins une action de formation ;
  • acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de l’expérience (VAE) ;
  • bénéficié d’une progression salariale ou professionnelle.

Cependant, cette loi prévoit qu’un accord collectif d’entreprise ou, à défaut de branche, peut prévoir d’autres modalités d’appréciation du parcours professionnel du salarié que celles ainsi mentionnées.

Abondement du CPF du salarié dans les entreprises d’au moins 50 salariés

La loi  du 5 septembre 2018 avait modifié  la règle applicable aux entreprises d’au moins 50 salariés.

Dans ces entreprises, le salarié qui, au cours des six années précédentes, n’a pas bénéficié des entretiens prévus et d’au moins une des formations autres que «  celle qui conditionne l’exercice d’une activité ou d’une fonction, en application d’une convention internationale ou de dispositions légales et règlementaires »  bénéficie d’un abondement inscrit sur son compte personnel de formation (CPF). Se trouvent ainsi prises en compte les formations non obligatoires.

L’entreprise doit dans ce cas verser une somme dont le montant ne peut excéder six fois le montant annuel fixé pour l’alimentation du CPF du salarié. Le salarié est informé de ce versement.

Le décret du 18 décembre 2018 relatif aux modalités d’abondement du CPF précise que ce salarié bénéficie à ce titre d’un abondement de son CPF d’un montant de 3 000 euros. La somme est versée par l’employeur à la CDC qui en assure la gestion et le compte du salarié est abondé dès sa  réception.

L’employeur adresse à la CDC les informations permettant cet abondement, en particulier le montant, le nom du salarié et les données permettant son identification.

Le versement et la transmission des informations doivent être effectués « au plus tard le dernier jour du trimestre civil suivant la date de l’entretien professionnel pris en compte pour apprécier la période de six ans », selon les termes du décret du 30 décembre 2021 relatif au recouvrement des contributions de formation des employeurs.

Cet abondement  n’entre en compte ni dans le mode de calcul du montant des droits inscrit chaque année sur le CPF du salarié, ni dans le plafond.

En cas de contrôle par les agents en charge du contrôle de la formation professionnelle, l’entreprise qui n’a pas versé cette somme ou a effectué un versement insuffisant est mise en demeure de procéder à ce versement. A défaut, un montant équivalent à  l’insuffisance constatée, majorée de 100 %, doit  être versé au Trésor public.

(Références : décret n° 2018-1171 du 18 décembre 2018 relatif aux modalités d’abondement du CPF ; décret n° 2021-1916 du 30 décembre 2021 relatif au recouvrement, à l’affectation et au contrôle des contributions des employeurs ; articles L  6323-13,L 6323-15, R 6323-3 du code du travail).

Consultation du comité social et économique (CSE) sur la politique sociale de l’entreprise et entretien professionnel

Dans le cadre des « dispositions supplétives » applicables en l’absence d’accord d’entreprise ou d’accord entre l’employeur et le comité social et économique (CSE), la loi du 5 septembre 2018 précise que la consultation du CSE sur la politique sociale inclut également « les informations sur la mise en œuvre des entretiens professionnels et de l’état des lieux récapitulatif ».

(Référence : article L 2312-26 du code du travail).

Covid 19 : impact sur l’entretien professionnel et l’état des lieux récapitulatif du parcours professionnel

La loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire et l’ordonnance du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence en matière de formation professionnelle avaient adapté les dispositions concernant l’entretien professionnel et son état des lieux tous les six ans, depuis mars 2014.

D’une part, l’entretien professionnel devant intervenir entre le 1er janvier 2020 et le 30 juin 2021 pouvait être reporté, à l’initiative de l’employeur, jusqu’au 30 juin 2021.

D’autre part, les dispositions prévoyant pour les entreprises de 50 salariés et plus une sanction financière destinée à abonder le compte personnel de formation (CPF) du salarié qui n’a pas bénéficié des entretiens professionnels et d’au moins une formation non obligatoire n’étaient pas applicables, à compter du 12 mars 2020 et jusqu’au 30 septembre 2021.  Cette absence de sanction valait également  pour les entreprises qui choisissaient d’appliquer pour cet état des lieux la réglementation précédente.

Pour les entretiens d’état des lieux qui n’avaient pu avoir lieu avant le 30 juin 2021, l’employeur bénéficiait ainsi d’une « possibilité de rattrapage » et avait jusqu’au 30 septembre 2021 pour les réaliser sans encourir de sanction. La mesure transitoire s’appliquait de fait jusqu’au 30 septembre 2021.

Concernant les manquements constatés sur la période de mars 2014 à septembre 2021, l’abondement correctif devait intervenir avant le 1er mars 2022, date limite de versement du solde de la contribution de formation professionnelle.

Par ailleurs, il doit être tenu compte de la date à laquelle l’employeur a procédé à l’entretien d’état des lieux pour déterminer l’échéance du prochain entretien professionnel

(Références : loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire ; ordonnance du n° 2020-1501 du 2 décembre 2020 modifiant l’ordonnance n° 2020-387 du 1er avril 2020 portant mesures d’urgence en matière de formation professionnelle ; articles L 6315-1, L 6323-13 du code du travail ; Questions-réponses du ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion – Entretien professionnel, 21 juin 2021 ).