La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel dessaisit les régions de la responsabilité de la politique d’apprentissage, mais leur permet de financer à titre complémentaire les CFA.
Perte par les régions de la responsabilité de la politique régionale d’apprentissage et financement des CFA à titre complémentaire
1. Les régions sont dessaisies par la loi du 5 septembre 2018 de leurs responsabilités dans la définition et la mise en œuvre de la politique régionale d’apprentissage. Ces missions avaient avait été renforcées par les précédentes réformes.
Cette perte de responsabilité est actée par les modifications des dispositions du code du travail et du code de l’éducation.
Les régions n’établissent plus la carte régionale de l’apprentissage.
Les CFA cessent d’être créés par un accord de la région matérialisée par la signature d’une convention. Ils sont librement créés par les organismes de formation, sous réserve du respect de la nouvelle règlementation.
La région doit cependant « contribuer à la mise en œuvre du développement de l’apprentissage de manière équilibrée sur son territoire ».
2. Les régions n’assurent plus le financement à titre principal des CFA. Ceux-ci sont financés au coût par contrat par les opérateurs de compétences.
Cependant, selon les termes de cette loi, la région financer toujours les CFA, en complément du financement au contrat par les opérateurs de compétence « quand des besoins d’aménagement du territoire et de développement économique qu’elle identifie le justifient ».
Elle peut à ce titre :
- « en matière de dépenses de fonctionnement, majorer la prise en charge des contrats d’apprentissage assurée par les opérateurs de compétences » ;
- « en matière de dépenses d’investissement, verser des subventions ».
La loi du 5 septembre 2018 indique que le montant des dépenses ainsi engagées et mandatées fait l’objet d’un débat annuel en conseil régional sur la base d’un rapport présenté par le président de la région qui peut porter également sur les autres dépenses engagées en matière d’apprentissage. Ce rapport comprend une annexe présentant ces dépenses et un état détaillé de leur affectation qui est transmis au préfet de région et à France compétences.
Ces dépenses s’inscrivent dans les orientations du contrat de plan régional et peuvent à ce titre faire l’objet de convention d’objectifs et de moyens avec les opérateurs de compétences agissant pour le compte des branches adhérentes.
Cette loi, modifiée par la loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, précise que les ressources allouées à la région pour ces dépenses d’investissement sont « déterminées et réparties chaque année par la loi de finances sur la base des dépenses d’investissement constatées au titre des exercices 2017, 2018 ». Cette disposition vise à sécuriser les montants attribués à ce titre aux régions.
(Références : articles L 6121-1, L 6211-3 du code du travail).
Les modalités de financement des régions
Les régions sont financés au titre du financement de l’apprentissage et des CFA par un prélèvement sur les recettes de l’Etat, par une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) et par une affectation par France compétences d’une part des contributions formations des employeurs.
Financements des régions institués par la loi de finances à compter de 2020
Les régions sont destinataires à compter de 2020 d’enveloppes destinées à financer l’apprentissage et les CFA.
1. La loi du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 institue, selon l’exposé de ses motifs « un dispositif assurant la neutralité budgétaire de la réforme de l’apprentissage pour les régions d’un montant total net » de 218,2 millions d’euros.
Concernant les quatorze régions dont « les ressources compensatrices supprimées ont excédé le financement des charges en matière d’apprentissage », sont institués et répartis entre elles :
- un prélèvement sur les recettes de l’Etat d’un montant de 72 582 185 euros ;
- un versement d’une part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) d’un montant de 156 886 260 euros, correspondant à l’exécution 2018 de cette fraction.
Concernant les deux régions présentant « un montant ressources compensatrices inférieur au montant des dépenses d’apprentissage constatées », il est procédé à une reprise sur les fonds versés dont le montant est fixé à 11 289 326 euros.
2. Cette loi de finances pour 2020 prévoit également qu’à compter de 2020 le prélèvement sur les recettes de l’Etat est majoré de 49 976 900 euros au profit des régions et réparti entre elles afin de participer à la couverture des charges afférentes à l’apprentissage ainsi qu’aux reliquats des dépenses au titre de la prime d’apprentissage incombant aux régions du 1er janvier 2020 jusqu’en 2021.
(Référence : loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020, article 76).
Financements affectés aux régions au titre des contributions formation des employeurs
Affectation
1. L’une des missions de France compétences est de verser aux régions des fonds pour le financement des CFA, selon des modalités définies par décret « après concertation » avec ces régions.
Un décret du 30 novembre 2020 précise les modalités de versement que cette institution doit effectuer chaque année sur le produit des contributions des employeurs.
Ces fonds sont réservés sur la part des dépenses affectées au financement de l’alternance, avant les autres affectations.
Deux montants, fixés par arrêté du ministre chargé de la formation professionnelle, sont affectés aux régions pour le financement respectivement des dépenses de fonctionnement et des dépenses d’investissement des CFA et « justifiés par des besoins d’aménagement du territoire et du développement économique ».
Ces montants sont versés aux régions avant le 1er juin de chaque année. Cependant, par dérogation, le versement était effectué pour l’année 2020 avant le 30 novembre.
Ces ressources sont allouées aux régions selon les règles suivantes :
- les dépenses de fonctionnement sont réparties proportionnellement à la moyenne des dépenses constatées pour chaque région pour le fonctionnement des CFA au titre des exercices 2016,2017 et 2018 et le montant par région est fixé par arrêté du ministre chargé de la formation professionnelle ;
- celles au titre des dépenses d’investissement sont réparties proportionnellement à la moyenne des dépenses constatées au titre des exercices 2017 et 2018 et le montant par région est fixé par arrêté de ce ministre.
2. Un arrêté du 21 octobre 2019 fixe ainsi le montant du fonds de soutien affecté aux régions par Frances compétences pour le financement des dépenses de fonctionnement des CFA à 138 millions d’euros. Ce financement leur permet de majorer la prise en charge des contrats d’apprentissage assurée par les OPCO.
Un premier arrêté du 2 décembre 2020 fixe la répartition de ce fonds de soutien à l’apprentissage de 138 000 200 euros aux régions et à la collectivité de Corse.
3. Un montant de 180 millions d’euros est affecté aux régions afin de financer les dépenses d’investissement des CFA.
Un second arrêté du 2 décembre 2020 fixe le montant et la répartition de cette enveloppe investissement de 180 097 500 euros aux régions et à la collectivité de Corse.
(Références : décret n° 2018-1331 du 28 décembre 2018 relatif à l’organisation et au fonctionnement de France compétences, article 4, V, modifié modifié par le décret n° 2019-1326 du 10 décembre 2019 relatif à France compétences et aux opérateurs de compétences, article 3 ; décret n° 2020-1476 du 30 novembre 2020 relatif aux versements de France compétences aux régions pour le financement des centres de formation d’apprentis ; arrêté du 21 octobre 2019 fixant le montant du fonds de soutien aux régions et à la collectivité Corse ; arrêté du 2 décembre 2020 fixant la répartition du fonds de soutien à l’apprentissage aux régions et à la collectivité de Corse ; arrêté du 2 décembre 2020 fixant le montant et la répartition de l’enveloppe investissement prévue à l’article L 6211-3 du code du travail aux régions et à la collectivité de Corse ; articles L 6123-5, 2° et 3°, d, L 6211-3, R 6123-25, R 6211-4 du code du travail).
Fongibilité entre les ressources allouées aux régions pour les dépenses de fonctionnement et d’investissement des CFA
Le décret du 28 décembre 2021 relatif à l’utilisation des ressources allouées aux régions pour les dépenses de fonctionnement et d’investissement des CFA introduit un mécanisme de fongibilité entre elles.
La région peut affecter une fraction des ressources allouées pour les dépenses de fonctionnement aux dépenses d’investissement lorsqu’elle constate sur une même période à la fois :
- un montant de dépenses de fonctionnement engagées ou prévisionnelles inférieur au montant des ressources allouées à ce titre ;
- un montant de dépenses d’investissement engagées ou prévisionnelles supérieur au montant des ressources allouées à ce titre.
La fraction des ressources allouées pour les dépenses de fonctionnement qui sont affectées par la région aux dépenses d’investissement ne peut excéder un plafond fixé par arrêté dans la limite de 82 % du montant annuel des ressources allouées pour les dépenses de fonctionnement. Un arrêté du 20 janvier 2022 fixe le plafond à 80 % de ces dépenses
Les montants correspondants sont communiqués pour information au représentant de l’Etat dans la région et à France compétences.
A titre transitoire, la région peut affecter les ressources allouées pour les dépenses de fonctionnement qui n’ont pas été non engagées au 31 décembre 2021 au financement des dépenses d’investissement dans la limite de 82 % des ressources allouées au titre du fonctionnement des CFA en 2021.
(Références : décret n° 2021-1850 du 28 décembre 2021 relatif à l’utilisation des ressources allouées aux régions pour les dépenses de fonctionnement et d’investissement des CFA ; arrêté du 20 janvier 2022 fixant la fraction des ressources pouvant être affectées par les régions aux dépenses d’investissement des CFA ; article R 6211-5 du code du travail
Une responsabilité précédente des régions dans la mise en œuvre de la politique d’apprentissage maintenue jusqu’en 2019
La loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale avait contribué à renforcer les missions des régions dans le domaine de l’apprentissage.
1. Dans le cadre de cette règlementation précédente, la région était « chargée de la politique régionale d’accès à l’apprentissage et à la formation professionnelle des jeunes et des adultes à la recherche d’un emploi ou d’une nouvelle orientation professionnelle ».
A ce titre, elle définissait et mettait en œuvre la politique d’apprentissage et de formation professionnelle dans le cadre du contrat de plan régional de développement des formations et de l’orientation professionnelles élaboré au sein du Comité régional de l’emploi, de la formation et de l’orientation professionnelle (CREFOP).
Dans le cadre de ce contrat de plan la région arrêtait annuellement un programme régional d’apprentissage et fixait la carte régionale des formations professionnelles initiales sur son territoire conformément, en particulier, à ses décisions d’ouverture et de fermeture de formations par l’apprentissage.
2. La responsabilité de la région dans le domaine de l’apprentissage se concrétisait au niveau :
- de la création des centres de formation d’apprentis (CFA) et des sections d’apprentissage ;
- de ses recommandations aux organismes collecteurs concernant l’attribution à ces établissements des fonds non affectés par les entreprises de taxe d’apprentissage (part quota) et de contribution supplémentaire à l’apprentissage (CSA) ;
- du financement de ces établissements par les subventions qu’elle leur attribuait.
3. La région pouvait, compte tenu de ces missions, conclure des contrats d’objectif et de moyens (COM) pour le développement de l’apprentissage avec l’Etat, les organismes consulaires et les organisations représentatives de salariés et d’employeurs.
(Références, règlementation précédente : articles L 214-12, L 214-12-1, L 214-13, L 214-13-1 du code de l’éducation ; articles L 6121-1, L 6211 -3 du code du travail).